Après une magnifique journée chaude et ensoleillé où ma petite puce a enchainé baignades et lecture, elle me suit dans la chambre où je vais recharger mon oxygène.

L'espace de quelques minutes, cachée dans mon dressing où se trouve le cuve, je ne la vois pas. Quand je ressors mon petit bout est en larmes figée devant mon lit "Mais qu'est-ce qu'est-ce qu'il se passe mon ange?"

Dans un cri plein de larmes elle me raconte: "Tu sais maman je fais tout le temps le même cauchemar. Je me réveille le matin et je suis étonnée que tu ne sois pas encore venue me chercher alors je viens te voir, te secoue et tu ne réponds pas, tu ne bouges plus. Papa fait pareil et tu ne bouges toujours pas et alors on comprend que tu es morte! Et c'est horrible, je veux pas que tu sois morte, c'est pas possible, je veux pas que ce soit vrai. Je pourrais pas le supporter, ça fait trop mal en dedans."

Comment rassurer mon tout petit bout qui finalement n'est plus assez petit pour ne pas analyser tout ça? Comment lui dire que je serai toujours là pour la protéger alors que je ne sais même pas si c'est la vérité? Je ne peux que lui dire que même si les choses tournent mal, ça ne sera jamais aussi brutal que ça. Je ne vais pas mourir dans la nuit et on va tout faire pour se battre jusqu'à la greffe, pendant la greffe et même après pour enfin avoir une vie sans angoisse, une vie d'insouciance. Je l'aime tant, je voudrais tant la protéger mais je ne peux rien faire pour l'empêcher de penser:

"Tu sais maman, je sais que ça ne correspond pas du tout à ta façon de penser mais desfois quand le choses sont trop dures à vivre, j'ai déjà pensé à me suicider... " Ce mot sort de sa bouche comme s'il s'agissait d'un mot honteux, elle n'ose même pas me regarder. " Mais j'ai réfléchi et il n'y a pas de façon de mourir sans avoir mal, même quand on voit les gens à la télé se faire tuer, y'a toujours un moment où on a mal, on ne peut pas mourir sans avoir mal alors c'est comme si on était prisonnier de sa vie!"

Ma perle, mon sang, ma vie, je ne veux pas que tu aies ce genre d'idées. Je comprends que ça puisse te traverser l'esprit mais je veux que tu t'accroches à ce qu'on a de bien pour affronter au mieux ce qui est difficile. "Je ne veux pas vraiment mourir en fait, me dit-elle, mais je me dis simplement parfois que ça aurait été plus facile de ne pas être née, ou du moins pas de toi, pas de toi malade, parce qu'à part cette putain de maladie de merde, je ne te trouve aucun défaut, tu es vraiment la maman parfaite et j'aimerais tant que tu sois la même mais juste avec la maladie en moins... Tu sais après la greffe, il y a des tas de choses que je veux faire avec toi mais déjà je voudrais simplement pouvoir marcher avec toi sans te voir en souffrir..."

Que cette soirée fût difficile et pourtant comme je suis contente qu'elle ait pu ouvrir les vannes... Elle ne veut pas voir un psy, elle en a déjà vu et trouve que ça ne sert à rien. Elle dit ne pouvoir se confier qu'à moi et verrait comme une punition le fait de la ramener voir le psy après ses confidences et c'est là qu'elle risque de se fermer. Enfin, je pense... Comment connaitre le bon chemin, comment ne pas faire d'erreur qui rejaillisse maintenant ou bien dans quelques années?...

"Tu sais maman, je t'ai dit tout ça mais même si c'est dur, je m'accrocherai s'il t'arrivait quelque chose parce que je sais que c'est ce que tu voudrais pour moi! - Oui ma chérie, ma seule réussite sur cette terre c'est toi, et je veux que tu gardes ça en toi, au plus profond de ton coeur, savoir que maman a gagné parce que ce qu'elle voulait c'est que son petit bout soit heureux! - Oui maman, je serai heureuse et j'aurais plein d'enfants parce que mon but à moi aussi c'est d'avoir des enfants, et je m'en occuperai comme toi, parce que personne au monde n'est plus proche que toi et moi"

Il était bien tard quand mon petit bout a fermé l'oeil hier soir, et pourtant ce matin elle était toute guillerette. Nous n'avons reparlé de rien, elle m'a juste dit "je me sens légère!!" Jusqu'à quand? Oh mon bébé, comme tu le dis "quand est-ce que ce putain de téléphone va bien vouloir sonner???" pour que je puisse te donner la vie que tu mérites...

Innocence rime avec enfance dit-on, si seulement j'avais le pouvoir de rendre cette maxime vraie...

Lâcher les vannes

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